Auteur: Paola
Predictori
Titre Original: Mon hiver à Zéroland
Date de Parution : 14 novembre 2013
Éditeur : Éditions les Escales
Nombre de pages : 305
Prix : 21,90€ 20,81€
Quatrième de couverture : « Le plus terrible, ce n’est pas de perdre les
personnes que l’on aime, c’est de cesser d’en parler » nous dit Alessandra,
dix-sept ans, confrontée trop jeune à la perte de sa mère. De retour au lycée
après ce drame, Alessandra n’a pas la force d’affronter ses anciens amis. Elle
choisit alors la compagnie de « Zéro », Gabriele de son vrai prénom, le mauvais
élève, toujours en marge de la classe. Ce qu’elle aime à « Zéroland », c’est le
silence et la solitude qui règnent en maîtres. Les règles y sont strictes : on
ne se parle pas, on ne se regarde pas. Par-delà les mots, une complicité
fragile se noue toutefois peu à peu, et Alessandra découvre bientôt un jeune
homme attentionné et passionné de dessin. Mais elle reste tiraillée entre son
monde d’avant et « Zéroland », son monde avec lui, au point de mettre en danger
ce qui les lie… Une année dans la vie d'une jeune fille de 17 ans qui met son
cœur en berne ou plutôt en hibernation, pour peu à peu retrouver goût à la vie
au contact d'un autre coeur adolescent gelé…
Extrait
Ma mère
Je me rappelle encore le jour où l'on m'a pincée en train de voler.
J'avais huit ans, peut-être neuf, c'était dans un petit supermarché de quartier
où, depuis les caisses, on embrassait tous les rayons du regard. Sur un
présentoir de papeterie j'avais aperçu une gomme rose en forme de coeur et je
n'avais pu résister. Une caissière m'était tombée dessus et m'avait ordonné de
rendre ce que j'avais pris. Sans la regarder dans les yeux, je lui avais
restitué la gomme et j'avais pris la fuite.
La peur est la même que celle ressentie ce jour-là. Le coeur qui bat la
chamade, un bruit assourdissant qui part du torse et remonte jusque dans les
oreilles, on n'entend même plus ses propres mots. Soudain tout est tellement
réel que cela semble faux. Je me souviens de tous les détails de cet instant.
La caissière portait une jupe bordeaux et des mocassins noirs. Près de la gomme
en forme de coeur trônaient des trousses en toile bleue. Les gens qui faisaient
la queue aux caisses s'étaient retournés pour me regarder. J'étais partie en
courant, terrorisée. Le temps que j'arrive à la maison, la terreur s'était
transformée en honte et j'avais décidé de ne jamais le raconter à personne.
Quand on annonça à ma mère qu'elle avait un cancer du rein, la peur me
gagna comme cette fois-là : elle me saisit à la gorge, se mélangea à mon sang
et, quand elle atteignit mon coeur, elle le mit en pièces. Ma mère avait
trente-sept ans, elle s'appelait Anna. Deux ans plus tard, elle est morte.
Vivre dans la peur, maintenant je le sais, est le pire des cauchemars,
et c'est ainsi qu'a vécu ma mère pendant toute cette période, en pensant à la
mort jour après jour, heure après heure. Elle prit l'habitude de garder sa
lampe de chevet allumée toute la nuit et de ne plus fermer les volets. Elle
disait que notre maison était sombre, que la lumière n'entrait pas assez par
les fenêtres. Elle entama sa bataille contre l'obscurité en faisant retirer les
rideaux du salon et se mit à détester la nuit, elle qui l'avait toujours aimée.
Ma famille n'a jamais été du genre traditionnel, papa maman frères
soeurs. Je n'ai eu pour famille que ma mère et ma grand-mère. Mon grand-père
est mort quand j'étais toute petite et je n'ai jamais connu mon père. Il est
parti quand ma mère est tombée enceinte. Désormais nous nous retrouvons à deux
et j'ai peur de penser à l'avenir.
Un de mes souvenirs d'enfance est un film tourné par mon grand-père le
jour de mon troisième anniversaire, où nous fêtions aussi la maîtrise de
lettres de ma mère.