Les
contes de Grimm proposent une vision du monde et de l'Univers. Dans ces contes,
se cache des croyances, de vieux rituels disparus. Les contes de Grimm ne sont
pas que des histoires pour endormir les enfants !. Les contes portent un regard
lucide sur la nature humaine. Les contes de Grimm sont libres de droits et
accessibles gratuitement. Bonne Lecture.
Blanche
Neige
C'était l'hiver.
Une reine cousait,
assise auprès d'une fenêtre dont le cadre était en bois d'ébène, tandis que la
neige tombait à gros flocons.
En cousant, la reine se
piqua le doigt et quelques gouttes de sang tombèrent sur la neige. Le contraste
entre le rouge du sang, la couleur de la fenêtre et la blancheur de la neige
était si beau, qu'elle se dit :
- Je voudrais avoir une
petite fille qui ait la peau blanche comme cette neige, les lèvres rouges comme
ce sang, les yeux et les cheveux noirs comme les montants de cette fenêtre.
Peu de temps après, elle
eut une petite fille à la peau blanche comme la neige, aux lèvres rouges comme
le sang, aux yeux et aux cheveux noirs comme l'ébène. On l'appela Blanche
neige. Mais la reine mourut le jour de sa naissance.
Un an plus tard le roi
se remaria. Sa femme était très belle et très jalouse. Elle possédait un miroir
magique, don d'une fée, qui répondait à toutes les questions. Chaque matin,
tandis que la reine se coiffait, elle lui demandait :
- Miroir, miroir en bois
d'ébène, dis-moi, dis-moi que je suis la plus belle. Et, invariablement, le
miroir répondait :
- En cherchant à la
ronde, dans tout le vaste monde, on ne trouve pas plus belle que toi.
Cependant, Blanche neige
grandissait et devenait de plus en plus gracieuse.
Un jour où, comme de
coutume, la reine interrogeait son miroir, celui-ci répondit :
- Reine, tu étais la
plus belle, mais aujourd'hui Blanche neige est une merveille.
A partir de ce moment,
la reine se mit à haïr Blanche neige. Enfin, n'y tenant plus, elle fit venir un
de ses gardes et lui dit :
- Emmène cette enfant
dans la forêt et tue-la.
Le garde conduisit
Blanche neige dans la forêt, mais, comme il levait son couteau pour la tuer, il
fut si ému par ses larmes et sa beauté qu'il n'acheva pas son geste. En
s'éloignant, il pensa qu'elle serait bientôt la victime des bêtes sauvages.
La pauvre Blanche neige
demeurée seule dans la forêt se mit à courir, trébuchant sur les cailloux. Vers
le soir, alors que ses petits pieds ne pouvaient plus la porter, elle arriva
auprès d'une jolie maisonnette et entra se reposer.
Elle y trouva une petite
table dressée, avec sept petites assiettes et sept petits couverts. Contre le
mur, il y avait sept petits lits, aux draps bien tirés, blancs comme neige.
Blanche neige, qui avait très faim et très soif, mangea un peu de la nourriture
préparée dans chaque assiette et but une gorgée de vin dans chaque verre. Puis,
comme elle était très fatiguée, elle se coucha et s'endormit immédiatement.
Le soir, les habitants de la maisonnette
arrivèrent. C'étaient sept nains qui cherchaient dans la montagne de l'or et
des diamants.
Le premier nain,
regardant autour de lui, vit une petite fille qui dormait couchée dans son lit.
Il appela ses compagnons qui se précipitèrent, élevant leurs lanternes pour
mieux la voir.
- Oh, la jolie petite
fille ! s'écrièrent-ils.
Ils la laissèrent
dormir, la veillant avec amour.
Quand Blanche neige se
réveilla et qu'elle vit les sept nains, elle eut d'abord peur. Mais ils étaient
si doux et si souriants qu'elle se rassura bientôt. Ils lui demandèrent son nom
et comment elle était parvenue dans leur demeure.
La petite fille leur
raconta son aventure. Les nains lui proposèrent de rester avec eux.
- Tu t'occuperas de la
maison, tu feras la cuisine, et tu raccommoderas notre linge. . .
Blanche neige remercia
et accepta, toute heureuse.
Dans la journée, pendant
que les nains étaient partis extraire l'or et les pierres précieuses de la
montagne, la fillette restait seule. Mais ils lui avaient bien recommandé de
n'ouvrir à personne.
- Méfie-toi de ta
belle-mère. Elle ne tardera pas à apprendre que tu es vivante, et viendra te
rechercher jusqu'ici.
La reine croyait être de
nouveau la plus belle femme du monde. Un jour, elle voulut se le faire
confirmer par son miroir. Le miroir répondit :
- Reine, tu étais la
plus belle, mais Blanche neige au pays des sept nains, au-delà des monts, bien
loin, est aujourd'hui une merveille.
La reine savait que son
miroir ne mentait pas. Furieuse, elle comprit que le garde l'avait trompée et
que Blanche neige vivait encore.
Elle réfléchit longtemps
au moyen de s'en débarrasser, et décida de se rendre chez les sept nains. Après
s'être bruni le visage et habillée en marchande, elle frappa à la porte de la
maisonnette en criant :
- Belle marchandise à
vendre, belle marchandise !
Blanche neige se pencha
à la fenêtre et demanda :
- Bonjour brave femme.
Que vendez-vous ?
- Des corsets, des
rubans, et toutes sortes de colifichets.
" Je peux bien
laisser entrer cette brave femme ", pensa Blanche neige, et elle ouvrit la
porte pour acheter quelques rubans pour son corselet...
- comme ils vous vont
bien! s'exclama la marchande avec admiration. Mais laissez-moi vous lacer, vous
jugerez mieux de l'effet. Blanche neige, qui ne se doutait de rien, la laissa
faire. La vieille serra si vite et si fort que la jeune fille tomba à terre
comme morte.
- Et maintenant, ricana
la reine, je suis de nouveau la plus belle femme au monde. Et elle quitta
rapidement la maisonnette.
Le soir, en rentrant,
les sept nains furent épouvantés à la vue de Blanche neige gisant à terre, sans
vie. Apercevant le corselet tellement serré, ils coupèrent immédiatement les
lacets. Blanche neige peu à peu revint à la vie.
Elle leur raconta ce qui
s'était passé. Les nains lui dirent alors :
- cette vieille
marchande devait être ta belle-mère, Fais bien attention désormais et ne laisse
entrer absolument personne.
Cependant, la reine,
revenue dans son palais, prit son miroir et le consulta. Elle apprit ainsi que
Blanche neige était toujours en vie, et entra dans une violente fureur.
"Il faut pourtant qu'elle disparaisse" pensa-t-elle, Elle enduisit un
peigne de poison, prit un autre déguisement, partit à travers la montagne et
arriva à la maison des sept nains. Elle frappa à la porte et cria :
- Belle marchandise à
vendre, belle marchandise !
Blanche neige se pencha
à la fenêtre, mais ne voulut pas la laisser entrer.
- Vous pouvez toujours
regarder, lui dit-elle. Cela ne vous engage à rien. Et elle tendit le peigne
empoisonné à la jeune fille. Il était si beau que Blanche neige ne put résister
à la tentation. Elle entrebâilla la porte et acheta le peigne.
- Laissez-moi donc vous
coiffer joliment, lui dit la marchande. Mais à peine avait-elle passé le peigne
dans les cheveux de la jeune fille que le poison commença à agir et que Blanche
neige tomba à terre sans connaissance.
Par bonheur, ce jour-là,
les nains revinrent plus tôt que de coutume. En voyant Blanche neige étendue à
terre, pâle comme une morte, ils comprirent que sa belle-mère était encore
venue. Ils découvrirent le peigne empoisonné, l'arrachèrent, rendant ainsi la
vie à la jeune fille.
Puis ils lui firent
promettre de ne plus ouvrir la porte sous aucun prétexte.
La reine, arrivée au
palais, demanda à son miroir :
- Miroir, miroir en bois
d'ébène, dis-moi que je suis la plus belle. Et le miroir répondit à nouveau que
Blanche neige était une merveille.
Cette réponse fit
trembler la reine de rage et de jalousie. Elle jura que Blanche neige mourrait,
dut-elle mourir elle-même. Elle alla dans son cabinet secret et prépara une
pomme empoisonnée. Celle-ci était belle et appétissante. Cependant, il
suffisait d'en manger un petit morceau pour mourir. La reine se maquilla,
s'habilla en paysanne et partit pour le pays des sept nains. Arrivée à la
maisonnette, elle frappa à la porte.
- Je ne peux laisser
entrer personne, on me l'a défendu, dit Blanche neige.
- J'aurais pourtant bien
aimé ne pas remporter mes pommes, dit la paysanne. Regarde comme elles sont
belles. Goûtes-en une.
- Non, répondit Blanche
neige, je n'ose pas.
- Aurais-tu peur ?
Tiens, nous allons la partager. . .
La reine n'avait
empoisonné la pomme que d'un seul côté, le côté rouge, le plus appétissant:
Elle la coupa en deux et tendit la partie empoisonnée à Blanche neige, tout en
mordant dans l'autre. Rassurée, la jeune fille la porta à sa bouche. Elle ne
l'eut pas plutôt mordue qu'elle tomba comme morte. La reine eut alors un rire
diabolique.
- Blanche comme la
neige, rouge comme le sang, noire comme l'ébène, tu es bien morte cette fois et
les nains ne pourront pas te redonner la vie.
De retour- au palais,
elle interrogea son miroir qui lui répondit :
- En cherchant à la
ronde, dans tout le vaste monde, on ne trouve pas de plus belle que toi.
Et son cœur jaloux fut
apaisé.
Quand les sept nains revinrent à leur demeure,
ils trouvèrent Blanche neige étendue sur le sol. cette fois, elle semblait bien
morte. Désespérés, ils la pleurèrent sans arrêt pendant trois jours et trois
nuits. Ils voulurent l'enterrer, mais comme ses joues demeuraient roses et ses
lèvres fraîches, ils décidèrent de ne pas la mettre sous terre, mais de lui
fabriquer un cercueil de cristal et de la garder près d'eux.
Ils placèrent le
cercueil sur un rocher, à côté de la maisonnette, et ils montèrent la garde à
tour de rôle. Les années passèrent. Blanche neige semblait toujours dormir
tranquillement dans son cercueil de cristal, fraîche et rose.
Un jour, un prince jeune
et beau traversa la forêt et s'arrêta chez les sept nains pour y passer la
nuit. Quand il vit le cercueil de cristal et la belle jeune fille endormie, il
fut pris d'un tel amour pour elle, qu'il dit aux nains :
- Faites m'en cadeau !
Je ne peux plus vivre sans voir Blanche neige.
Les nains, émus, lui
donnèrent le cercueil de cristal. Le prince le fit porter à dos d'homme jusqu'à
son palais. Chemin faisant, un des porteurs trébucha et la secousse fut telle
que le morceau de pomme resté dans la gorge de la jeune fille en sortit. Elle
ouvrit les yeux, souleva le couvercle du cercueil, et regardant autour d'elle,
dit :
- où suis-je ?
Tout joyeux, le prince
lui répondit :
- Tu es en sécurité avec
moi. Je t'aime plus que tout au monde, viens au palais du roi, mon père et je
t'épouserai.
Blanche neige consentit
avec joie. Leurs noces furent célébrées avec une splendeur et une magnificence
dignes de leur bonheur.
On invita tous les rois
et toutes les reines. Quand la belle-mère se fut parée de ses plus beaux
atours, elle posa à son miroir l'éternelle question.
Hélas, le miroir lui
répondit :
- Reine tu étais la plus
belle, mais la fiancée brille d'une splendeur sans pareille.
A ces mots, la reine
entra dans une violente fureur. Tout d'abord, elle ne voulut plus aller aux
noces. Puis elle ne put résister au désir de voir cette jeune princesse qui
était si belle. Quand elle reconnut Blanche neige, elle fut prise d'une telle
rage qu'elle tomba terrassée par sa propre jalousie.