Auteur: Helle Helle
Titre Original: Chienne de vie
Date de Parution : 3 janvier 2011
Éditeur : Le Serpent à plume
Nombre de pages : 230
Prix : 19,30€ 18,34€
Quatrième de couverture : Bente plaque tout. Son appart, son mari. Elle
échoue dans un endroit isolé au bout du bout du Danemark. C'est là que Johnny et
Cocotte la trouvent à un arrêt de bus. Ils l'adoptent.
Mais Johnny est victime d'un accident et Bente se retrouve seule chez
eux. Livrée à elle-même, elle va petit à petit entrer dans l'intimité du
couple, en s'occupant de leurs chiens, de leur maison, et ainsi peut-être,
redonner un sens à sa vie.
Extrait
Je cherche un bon endroit pour pleurer. Ce n'est pas si facile à
trouver. Mon voyage en bus a duré des heures, et à présent je suis assise sur
un vieux banc tout près de la côte. Il n'y a pas de ferry ici. Seulement un bac
qui traverse les bestiaux sur une île déserte au gré des saisons.
J'habite un lotissement avec de nombreuses fenêtres qui donnent sur la
route. J'aurais peut-être mieux fait d'en nettoyer quelques-unes. Enfin, de
toute façon, on ne voit plus à travers à cause des plantes. L'été dernier avait
été humide et la végétation avait poussé d'un coup. Aujourd'hui c'est l'hiver,
je ne rentrerai plus chez moi. D'habitude, à cette heure-ci, je dors un peu
dans le canapé. Bjørnvig est à la clinique. Il gèle une verrue.
Le vent souffle fort. Il m'a fouetté le visage lorsque je suis descendue
du bus avec ma valise à roulettes. Le ciel est gris foncé au-dessus de la mer.
A droite, sur la piste cyclable qui longe l'eau, un homme en bleu de travail
s'approche péniblement sur son vélo. Il incline le buste vers le guidon en
pédalant. Je fais ça, moi aussi. C'est pour ça que je ne me déplace jamais à
vélo. Il s'arrête et descend. Scrute l'horizon, plante ses poings sur les
hanches. Il sait que je suis assise ici. Je baisse les yeux sur mes gants de
pécari.
Il remonte en selle et poursuit sa route le long de la mer. Dans
quelques instants, il bifurquera et s'éloignera de la piste cyclable pour
passer devant le cabanon et se diriger vers moi. Il tire son vélo sur les
derniers mètres qui nous séparent. Ses cheveux sont foncés et clairsemés. Il
n'est pas très vieux pourtant, quelques années de moins que moi.
- Vous êtes bien, là ? dit-il.
- Oui.
- Vous risquez d'y rester un moment.
- Je verrai, dis-je, pelotonnée dans mon châle. Nous regardons tous les
deux le panneau où sont affichés les horaires, puis la valise à roulettes.
- Eh bien, bonne chance, dit-il en remontant sur son vélo.
Il repart, rivé à sa selle, lève deux doigts en signe de salut. Il a le
vent dans le dos cette fois, et disparaît rapidement.