La dernière minute du
mois de juin 2012 comptera 61 secondes. Une façon comme une autre de remettre
les pendules à l'heure.
Pourquoi cette
"seconde intercalaire" ? Pour permettre au temps universel défini par
les horloges atomiques de compenser son avance sur celui rythmé par la rotation
de la Terre, bien plus irrégulière.
En "temps universel coordonné"
(UTC), aussi appelé à tort GMT, le passage entre le 30 juin et le 1er juillet
prochains se fera donc, non pas comme d'habitude à 23h59 et 59 secondes, mais
bien à "23h59 et 60 secondes" en temps universel (rajouter deux
heures pour l'heure française).
Avant 1972, le "temps était donné par
l'astronomie. C'est-à-dire que pour connaître l'heure, on regardait la position
d'un astre, le Soleil ou d'autres objets célestes" par rapport à la Terre,
résume Noël Dimarcq, directeur du laboratoire Syrte (Systèmes de référence
temps espace) à l'Observatoire de Paris.
"Aujourd'hui, le temps est construit,
défini et mesuré à l'aide d'horloges atomiques qui sont infiniment stables par
rapport au temps astronomique. Cela permet d'être sûr que tout le monde autour
de la Terre a la même heure", explique-t-il à l'AFP.
Le parc mondial de plusieurs centaines
d'horloges utilisé pour définir le Temps atomique international (TAI) mesure en
effet des modifications internes intervenant dans les atomes de césium, qui
permettent de "découper une seconde en à peu près 10 milliards de petites
graduations". Une précision telle qu'elles n'enregistreraient qu'une
"seconde de dérive tous les 300 millions d'années", souligne M.
Dimarcq.
Si le TAI est "une échelle de temps
continue", le temps donné par l'"horloge Terre" est quant à lui
beaucoup moins uniforme. La rotation de notre planète est en effet soumise à de
nombreux aléas, notamment les marées liées aux effets de la Lune, les
variations des vents, etc. Ainsi, un tour de la Terre sur elle-même en août est
plus court d'une à deux millisecondes qu'un tour accompli en février.
"Le temps donné par
l'orientation de la Terre finit par dériver par rapport au temps atomique. Et
pour éviter que l'écart entre les deux ne devienne trop important, la
communauté internationale, en particulier le Service international de la
rotation terrestre et des systèmes de référence (IERS) dont le centre est au
Syrte, décide d'ajouter une seconde à l'UTC", explique Noël Dimarcq.
A chaque fois que cet écart s'approche de 0,9
seconde, l'IERS entre en action et annonce cette fameuse "seconde
intercalaire", plusieurs mois à l'avance et uniquement le 31 décembre ou
le 30 juin.
Mais un tel événement est par définition aussi
irrégulier que la rotation de la Terre. Le dernier en date remonte au 31
décembre 2008 et le 30 juin prochain sera seulement la 25e seconde ajoutée au
temps universel depuis l'instauration de ce système.
Pour le commun des mortels, l'opération n'aura
pas de répercussion retentissante.
En revanche, les systèmes de haute précision,
comme les satellites ou certains réseaux informatiques, devront tenir compte de
ce "saut de seconde" sous peine de provoquer un décalage
potentiellement catastrophique. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle aucun
tir de fusée n'est jamais programmé ces jours-là, un décalage, aussi infime
soit-il, risquant de brouiller les calculs.
Jugeant que cette seconde intercalaire est
source de perturbations et d'erreurs, certains pays et industriels demandent
son abolition pour s'en tenir strictement au temps atomique.
C'est déjà le cas du système de
géolocalisation par satellites américain GPS qui, contrairement à son homologue
russe Glonass, n'utilise plus les secondes intercalaires depuis 1980.
Mais le GPS ajoute les
secondes manquantes par rapport à l'UTC dans le signal qu'il envoie au sol,
note Noël Dimarcq, pour qui "il y a vraiment deux façons de faire la
correction, avant ou après".