Incroyable Horace, Christophe Ruaults


Titre Original: Incroyable Horace
Date de Parution : 9 avril 2015
Éditeur : Michalon
ISBN: 978-2841867820
Nombre de pages : 304
Prix : 17,00€



Quatrième de couverture : Horace Bertholet a tout pour être heureux : marié depuis 18 ans avec la présentatrice vedette du 20 heures de TV1, il habite un très bel appartement à Paris, possède une résidence secondaire au Cap Ferret et passe ses vacances à l'Ile Maurice ou à Courchevel... Mais il étouffe! Ce professeur d'histoire-géo est fatigué de vivre dans l'ombre de cette working girl de l'info, ambitieuse et conquérante. Il ne reconnaît plus la femme qu il a aimée, la jeune journaliste qui s est laissée corrompre par le pouvoir et la notoriété. Il ne se sent plus à sa place dans ces soirées où le gratin politico-médiatique s adonne aux délices de l'entre-soi. Horace bouillonne. Son naturel calme et mesuré se disloque à grande vitesse et son comportement devient de plus en plus imprévisible. Au point de commettre, sur la route des vacances, un acte qui va bouleverser le cours de son existence. Pour Horace, rien ne sera plus jamais comme avant.
Un roman, plein d humour et de tendresse, dont le héros désabusé et touchant renvoie aux questions que chacun se pose sur le sens de sa vie et les désirs profonds qui nous animent.

Extrait
Première alerte

Mercredi 4 mai

«Dans cinquante mètres, tournez à droite.»
La voix de Juliette était calme, posée, aussi douce qu'à l'habitude. Elle ne trahissait rien d'autre que sa volonté de bien faire. Elle était rassurante, Juliette, jamais elle ne s'emportait, jamais elle n'invectivait. Sûre d'elle-même et des informations qu'elle délivrait, pas du genre à douter. Il faudrait que les hommes suivent son exemple, songea Horace, qu'ils apprennent à maîtriser leurs nerfs et qu'en aucune circonstance ils ne haussent le ton. Bien des problèmes nous seraient épargnés si nous autres, pauvres humains trop souvent victimes de nos émotions, nous ne perdions jamais notre self-control. C'en serait fini des escalades verbales et des situations qui dégénèrent, des emportements et des guerres qui éclatent. L'harmonie régnerait à la surface du globe, le chaos serait K.O.
Horace Bertholet se demanda pourquoi le vagabondage de ses pensées le conduisait parfois vers des réflexions aussi saugrenues. Elles empruntaient alors un chemin qu'elles seules maîtrisaient, sans être géolocalisées ni assistées par quelque appareil que ce soit, et prenaient des directions inconnues. Obéissant à l'injonction de Juliette, il tourna à droite, même s'il savait que la voix numérique ne lui en aurait pas tenu rigueur s'il avait décidé de prendre à gauche. Il n'aurait eu ni reproches ni questions, juste de nouvelles indications pour revenir dans le droit chemin. Un GPS, c'est comme un chien, il ne vous juge pas. Bizarrement, Horace se fit cette comparaison alors qu'il n'avait pas de chien. Cécile n'en avait jamais voulu - trop salissant. Pas de chien, pas plus que de chat, de hamster, de tortue, de furet, de macaque ou de léopard de Perse. Elle avait toujours accordé une grande importance à la propreté des trois appartements dans lesquels la famille avait vécu successivement jusqu'à ce jour. D'abord en y veillant par elle-même, puis en déléguant cette responsabilité à une employée de maison dès le deuxième appartement, plus grand que le précédent mais plus petit que le suivant.
A vrai dire, la maniaquerie de son épouse ne posait pas de problème à Horace car il avait fini par s'en accommoder et même par s'en satisfaire. Il appréciait de rentrer, le soir, dans leur vaste appartement de la rue Scribe en retrouvant chaque chose à sa place et, dans l'air, les senteurs résiduelles des produits d'entretien bio dont se servait Sara, la femme de ménage, également cuisinière, sortie gagnante d'une sélection impitoyable. Cécile, elle, aimait à se dire qu'il s'en faudrait de peu pour que leur intérieur ne puisse figurer tel quel dans un catalogue Roche Bobois. Évidemment, avec deux enfants à la maison et en attendant que les règles soient assimilées par tous, maintenir à niveau ses ambitions domestiques avait été un combat de tous les jours. Horace n'avait rien fait pour empêcher sa femme de le mener. Mais alors pourquoi, en cet instant précis, à 46 ans et après dix-huit ans de mariage, assis au volant de la Polo que Cécile lui avait offerte, avait-il envie d'un chien ?